2 juin 1916 : le siège du fort de Vaux commence

Malgré les échecs sanglants de l’armée allemande sur la rive gauche depuis le début du mois de mai, Falkenhayn souhaite, une fois encore, marquer les esprits et remporter une victoire tactique prestigieuse en s’emparant du fort de Vaux. Néanmoins le temps presse, car l’imminence d’une offensive alliée sur la Somme est désormais une certitude pour l’OHL.

Le secteur visé par les Allemands est alors défendu par le 142e RI. Ce régiment occupe des positions autour du fort de Vaux de la manière suivante : la 6e compagnie et la 3e compagnie de mitrailleuses du 2e bataillon sont installés dans le fort, tandis que le reste du bataillon est posté devant et à l’est dans les tranchées de Belfort et de Besançon. Le 1er bataillon occupe le village de Damloup avec trois compagnies et la 4e compagnie occupe la batterie de Damloup et la tranchée de Saales. Le 3e bataillon stationne dans le secteur de Dicourt et de l’ouvrage de la Laufée.

Village de Vaux

Les ruines du village de Damloup.

Le 1er juin, les Allemands soumettent les positions françaises à un feu d’artillerie dévastateur qui anéantit nombre de tranchées françaises. Les troupes d’assaut allemandes (Stosstruppen), parties d’Hardaumont, s’approchent des abris français au débouché de ce qui reste du bois Fumin. Dans la nuit, ils parviennent à s’emparer des positions R2 et R3 dont ils ont chassés les défenseurs du 101e RI. Les positions françaises du bois de la Caillette sont cernées. Seule la position R1 résiste vaillamment et interdit le chemin du fort aux Allemands. Dans le même temps, et profitant du couvert des vapeurs de gaz asphyxiants, le village de Damloup est tombé presque par surprise, les défenses étant trop étirées pour empêcher les Stosstruppen de s’infiltrer. Malgré la résistance héroïque des combattants, les Allemands sont maîtres du village. Les rares survivants se replient sur le PC de la Fontaine. A 11h, la 11e compagnie du 3e bataillon du commandant Bouin tente de reprendre le village en utilisant l’unique boyau qui y conduit, mais les Allemands se sont déjà retranchés. Les soldats du 142e sont fauchés par la mitraille et sont contraints de se replier. Le fort de Vaux est désormais encerclé.

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Petit poste du fort de Vaux.

Les Allemands ont également lancé l’assaut contre le fort le même jour. Ils tombent sur les survivants du 101e qui sont retranchés dans le fort à l’intérieur du coffre double défendu par un canon-revolver et des mitrailleuses. Ils sont arrêtés mais tentent néanmoins de s’infiltrer par le coffre double au nord-ouest et le simple au nord-est. On se bat à la grenade, au lance-flammes, les mitrailleuses françaises sont ainsi réduites au silence. A l’intérieur de l’ouvrage, le commandant Raynal demande à la garnison d’installer des sacs de sable pour dresser des barricades dans les couloirs. Il témoigne de la fureur des combats : « Le sous-lieutenant Denizet de l’artillerie, qui défend le coffre double, vient me rendre compte que les Allemands, qui sont au-dessus de sa tête, ont, à l’aide de cordes, descendu des paniers de grenades juste à hauteur de nos embrasures, les ont fait exploser et ont mis des pièces hors de service. D’autres Allemands, rencontrant sous leurs pieds le travail que j’avais fait faire pour boucher un trou de cinq mètres percé dans la voûte par l’explosion d’un 380, ont défait de travail et l’on aperçoit leurs têtes grimaçantes se dessiner sur le fond du ciel. En lançant des grenades par ce trou, l’ennemi peut couper les défenseurs du coffre double. Je décide que ce coffre, dont les pièces sont maintenant inutilisables, sera évacué et je me clôture de ce côté, par un barrage, construit avec créneaux pour grenadiers, en arrière de l’ouverture percée par le 380.« 

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A 15h, il envoie le message suivant par pigeon voyageur : « L’ennemi s’est emparé des coffres nord-est et nord-ouest. Je poursuis la lutte dans les gaines. Nombreux réfugiés et blessés. Officiers et soldats font tout leur devoir et lutteront jusqu’au bout. » A 19h, depuis la redoute de Fleury, les observateurs remarquent à la jumelle que des lignes de fantassins allemands grimpent sur le fort… le siège vient de commencer.

SYLVAIN FERREIRA

Sources :

Mourir à Verdun, Pierre Miquel

JMO du 142e RI, cote 26 N 693/15