Les forces en présence

Depuis que Falkenhayn a décidé que Verdun serait la cible de l’offensive limitée qui doit permettre de piéger les alliés franco-britanniques, les forces de la Ve Armée du Kronprinz ont été considérablement renforcées en artillerie pour littéralement pulvériser les défenses françaises afin de permettre aux fantassins d’occuper le terrain sans combat ou presque.

L’artillerie reine des batailles

L’ensemble du dispositif d’attaque rassemble ainsi plus de 1000 pièces d’artillerie lourde (de 15 à 42 cm) auxquelles s’ajoutent 202 Minenwerfer, du jamais vu depuis le début de la guerre, surtout pour un front d’attaque aussi étroit : environ 15 kilomètres. On a donc en moyenne une batterie d’artillerie de quatre pièces tous les 150 mètres. Afin d’éviter les déboires rencontrés par les Français lors de l’offensive de Champagne de gigantesques stocks de munitions ont été constitués afin de « nourrir » le feu pendant au moins trois jours à compter du déclenchement de l’offensive. Pour acheminer ces munitions, les Allemands ont amménagé pas moins de quatorze voies ferrées qui depuis le 12 janvier ont vu passer 213 trains de munitions pour 2 500 000 obus. A partir du 21 février, il faudra 33 trains uniquement de munitions pour approvisionner les batteries allemandes. Chacun des trois corps d’armée qui doivent participer à l’assaut (le V. Reservekorps ne doit pas intervenir initialement) bénéficie d’un groupe d’aviation de réglage d’artillerie (Artillerie Fliegerabteilung) et de ballons captifs pour régler le tirs de ses batteries. Enfin deux escadrilles de chasse sont là pour garantir la maîtrise du ciel aux Allemands.

Minenwerfer lourd allemand de 25 cm

Minenwerfer lourd allemand de 25 cm

Une supériorité écrasante en hommes

Une fois le bombardement terminé, les Allemands ont prévu de lancer trois corps d’armée à l’assaut des lignes françaises : le VII. Reservekorps à l’ouest dans le secteur entre les villages de Brabant et Haumont avec deux divisions d’infanterie renforcée d’une brigade (24 bataillons d’infanterie), le XVIII. Armeekorps face au bois des Caures, lui aussi avec deux divisions d’infanterie (18 bataillons) et enfin le III. Armeekorps (l’un des meilleurs de l’armée impériale) toujours à deux divisions d’infanterie (20 bataillons) dans le secteur à l’est du bois d’Herbebois et Ornes. Dans chaque corps des compagnies de lance-flammes doivent soutenir la progression des troupes d’assaut (Stosstruppen) pour nettoyer les éventuels îlots de résistance français. Ce sont donc au total près de 60 000 hommes qui sont prêts pour s’emparer des lignes françaises.

Redoutables lance-flammes allemands à l'entraînement

Redoutables lance-flammes allemands à l’entraînement

Côté français, l’état-major ne peut compter que sur deux (72e, 51e) des cinq divisions d’infanterie (environ 20 000 h) du 30e corps du général Chrétien pour défendre la première ligne. De plus, la qualité des régiments qui composent ces deux divisions est très hétérogène. Et bien sûr, pour soutenir la défense du secteur, les Français ne peuvent compter que sur 270 pièces d’artillerie (presque six fois moins que les Allemands) et la moitié d’entre elles sont des canons de 75.

On comprend qu’à la lumière de cet état comparatif des forces en présence, les Allemands sont confiants et ne se doutent pas que les Français pourront survivre à l’intensité du bombardement de leurs positions pendant presque une journée, et encore moins à ce que les survivants trouvent les ressources nécessaires pour s’opposer à eux les armes à la main.

SYLVAIN FERREIRA

Sources :

Tranchées hors-série n°7,

Pyrrhic Victory de Robert A. Doughty,

Verdun, Paul Jankowski

Ligne de Front n°60, article sur les Stosstruppen par Hugues Wenkin