Région Fortifiée de Verdun, présentation

Tout au long de l’année nous vous présenterons en détail dans cette rubrique un fort ou un ouvrage particulier de la Région Fortifié de Verdun. Mais commençons par une vue d’ensemble. La défense du saillant de Verdun s’appuie sur la ceinture de forts et d’ouvrages construits autour de la ville depuis 1874. Longtemps considérés comme imprenables, les systèmes de fortifications ont été mis à mal par les obusiers lourds allemands dès le début de la Grande Guerre à Liège et Namur notamment. En février 1916, que représentent vraiment les fortifications autour de Verdun d’un point de vue militaire ?

Après le traumatisme de la défaite de 1870-71, la France décide de fortifier les grandes places qui bordent désormais la nouvelle frontière commune issue du Traité de Francfort et qui sanctionne la perte de l’Alsace et d’une partie de la Moselle. A partir de 1874 et jusqu’au déclenchement de la Grande Guerre, plusieurs villes (Lille, Maubeuge, Verdun, Toul, Epinal, Belfort, Pontarlier) sont ainsi pourvues d’un réseau de fortifications sur la frontière avec l’Allemagne mais aussi celles (Briançon, Nice) avec l’Italie (membre de la Triple Alliance) ainsi que Paris, Lyon et Marseille. L’organisation et la construction de ces places est supervisée par le général Séré de Rivières, commandant le Service du Génie de l’armée française à partir du 1er février 1874.

Le secteur nord de la RFV à la veille de l'offensive allemande

Le secteur nord de la RFV à la veille de l’offensive allemande

Une ceinture de pierre puis de béton

Verdun, comme les autres villes citées, voit donc la construction de 19 forts et 15 ouvrages de combat disposés pour former une ceinture à l’extérieur de la ville. Il existe une seconde ligne de repli puis l’enceinte de la ville et enfin la citadelle qui est modernisée. Contruits initialement en pierre recouverts de terre, ils peuvent soutenir le bombardement des pièces de gros calibres disponibles à l’époque. Les forts marquent le paysage de leurs formes polygonales (trapèze). Par contre, les emplacements de tir des pièces d’artillerie sont, au départ, à l’air libre. A partir de 1900, les progrès techniques de l’artillerie nécessitent d’ajouter du béton armé pour protéger la structure des forts (14 ont été modernisés à l’entrée en guerre). On voit également apparaître des casemates bétonnées pour protéger les pièces d’artillerie (casemates de Bourges, on en compte 23 à Verdun). La dernière amélioration en terme d’armement des forts viendra de la mise au point de différents types de tourelles blindées à éclipses abritant soit des mitrailleuses soit des canons (armées de canons de 75 ou de 155 mm). La défense des fossés des forts est assurée par 211 canons-revolvers, canons de 12 ou canons de 90 mm et 210 mitrailleuses de remparts. Un réseau militaire dédié de voie de 60 permet de relier les différents forts et d’acheminer les munitions et le matériel. Plus de 33 magasins permettent de stocker tout ce qu’il faut pour soutenir un siège long. Pour compléter ce dispositif, la place possède son propre réseau radiotélégraphique ainsi qu’un terrain d’aviation et un parc de dirigeable. Malheureusement, l’apparition dans l’armée allemande de mortiers lourds (21 cm et 30,5 cm ) et d’obusiers lourds (420 cm) va modifier l’appréciation de certains généraux français, dont Joffre, sur la valeur de ces systèmes défensifs ; surtout après la destruction en règle des forts belges de Liège en août 1914.

Plan du fort de Douaumont, fleuron de la RFV

Plan du fort de Douaumont, fleuron de la RFV

De la puissance au déclin

En août 1914, la place de Verdun est la plus puissante du dispositif Séré de Rivières. Les Allemands ne réussissent pas à l’investir et encore moins à s’en emparer en septembre. A l’Automne, le secteur devient « calme » et plus de 3 000 civils sont autorisés à vivre dans la ville. En ce qui concerne les fortifications, les moyens alloués par Joffre à la défense du secteur sont réduits, principalement à partir de l’été 1915 afin de préparer l’offensive de Champagne. Le 5 août 1915, Joffre crée la Région Fortifiée de Verdun qui place le secteur sous la tutelle du général commandant le Groupe d’Armée de l’Est (GAE), en l’occurence le général Dubail. Le commandement de la RFV est le général Herr qui succède au général Coutanceau, opposé aux ponctions de troupes et de matériels de Joffre. Des ordres seront même donnés de dynamiter les forts en cas d’attaque allemande victorieuse. Malgré les avertissements, de Driant notamment, sur l’état des défenses et les travaux de dernière minute mis en oeuvre à partir de février 1916, la place est devenue vulnérable et cette faiblesse sera parfaitement illustrée par la chute sans combat du fleuron que représente le fort de Douaumont.

SYLVAIN FERREIRA